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Le Dormeur du Val
Introduction
L'horreur de la guerre a inspiré de nombreux textes, l'un des plus célèbres
par la sobriété de sa dénonciation est peut-être le
sonnet Le Dormeur du Val d'Arthur Rimbaud.
Après avoir montré comment le poète nous dépeint
la nature puis l'homme, nous verrons l'interaction réunissant les aspects
contradictoires du poème.
I/
La nature
La nature est omniprésente dans le poème, elle occupe
intégralement le premier quatrain, et nous la retrouvons jusque
dans le dernier tercet. Elle se caractérise par une impression
de vie et de bonheur qui sollicite tous les sens. "Verdure" vers
1 est repris au vers 7 par "l'herbe" et au vers 8 par "vert".
Impression de luminosité avec "les haillons d'argent" vers 2
; renforcée au vers 3 et vers 13 par le soleil et dont la luminosité est
reprise au vers 4 "mousse de rayons" et vers 8 " lumière
qui pleut" : métaphore qui donne une matérialité à la
lumière.
Nature très colorée : vers 9 "les glaïeuls", couleurs
assez intenses. Personnification de la rivière qui "chante" vers
1, animation.
Sur le plan olfactif, "parfums" vers 12, impression de bien-être
et bonheur ; sur le plan tactile, impression de fraîcheur, liquidité,
vers 6 "et la nuque baignant dans le frais cresson bleu".
Le mot "val" du titre est repris au vers 4, rivière dynamique
; impression d'exubérance, par les deux enjambements des vers 1,2,3. De
plus cette nature est présentée comme douée de sentiments,
au vers 11 elle est personnifiée et présentée comme très
maternelle "berce" : Alma Mater.
II/
L'homme On remarque
que le jeune homme est "dans" la nature. Nous le voyons aux vers
6,8,9,13, avec le mot "dans", il est imbriqué dans
cette nature. Nous savons à qui nous avons à faire,
sociologiquement c'est un soldat. Le jeune homme est jeune comme
la nature. Il est présenté dans un état d'abandon
total : "bouche ouverte" vers 5, " sa nuque baignant" vers
6, " dort" vers 7, inactivité encore répétée
au vers 9 et 13 : insistance avec le titre du sonnet. Au vers
7, il est "étendu", intensifie l'impression de
confort ; vers 8 " un lit vert", la nature lui a construit
un lit.
Si on regarde d'un peu plus près, nous voyons qu'il paraît mort
: vers 14 "deux trous rouges sur le côté droit", + allitérations
en "r".
À partir de ce moment nous basculons dans l'horreur, dénouement
très brutal.
III/
Aspects contradictoires
La mort est en fait omniprésente : vers 1 le mot "trou" fait écho
avec le vers 14. L'adverbe "follement" vers 2 signifie l'agitation
de la rivière. Nous avons un côté glorieux avec
l'argent, mais en réalité les "haillons" vers
3, reflètent quelque chose de détruit. La "bouche
ouverte" est une caractérisation de la mort du soldat ;
sa tête est nue car son casque a roulé par terre ; "la
nuque baignant" vers 6 signifie qu'elle baignait dans le sang,
c'est à dire le sang sur l'herbe : rouge du sang + vert de l'herbe
= cresson bleu.
"Etendu" signifie un corps sans vie et le "lit" du vers 8
devient un lit de mort. Les glaïeuls évoquent les fleurs que l'on
posent sur une tombe => il a les pieds dans les glaïeuls. Plus rien ne
bouge, "la narine" et "la poitrine "ne réagissent
plus. Il ne respire plus, il est donc mort. Violence des allitérations
dentales pour trancher cette jeune vie. Nous comprenons à ce moment que
le sommeil du dormeur était une image de mort.
Conclusion
Ce poème illustre des thèmes très chers à A.
Rimbaud, à savoir le sens du tragique, de l'existence et la mort.
Son art s'illustre particulièrement avec les effets rythmiques
brisés, symboliques d'une vie brisée. Habileté par
laquelle il nous met sur une fausse piste, tout en nous laissant des
indices, à la réelle interprétation du poème.
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